Franz Moreau (1913 – 1962)

Franz Moreau est né à Leval-Trahegnies en 1913. Orphelin de père à l'âge de 5 ans, il est élevé par sa mère qui exerce le métier de couturière. Après des humanités à l'Athénée Royal de Mons, il obtient, en 1935, une licence en philologie classique à l'Université Libre de Bruxelles. C'est à l'U.L.B. qu'il rencontre Armand Simon, qui deviendra plus tard le grand dessinateur surréaliste. Les deux hommes se lient d'amitié et pendant toute leur vie s'échangeront de nombreuses lettres dans lesquelles on peut suivre la démarche poétique de Franz Moreau.
En 1937, il épouse Tamara Godart avec laquelle il a deux filles, Danielle et Anne.
Après des débuts en tant que professeur de français et de morale aux Athénées de Saint-Gilles et d'Ixelles et à l'école moyenne de Braine-l'Alleud, il revient en 1943 à l'Athénée de Mons, en qualité de professeur de latin et grec.
Enseignant avec passion, il marque plusieurs générations d'élèves. «Il était exceptionnel, témoigne Jacques Bouton, un ancien élève, il nous expliquait Virgile par Bachelard et, dans le cadre de son cours de langues anciennes, opérait des rapprochements entre les poètes antiques et contemporains. Avec lui nous avons découvert les surréalistes dont Eluard pour lequel Franz Moreau avait une grande affection.».
Aucun domaine artistique ne le laissait indifférent et les échanges intellectuels qu'il avait établis avec ses élèves permirent à certains d'entre eux de lui faire découvrir la musique de jazz américain. A la fin de sa vie, son intérêt pour le septième art le poussa à établir un parallélisme entre certains textes anciens et les techniques cinématographiques utilisées à notre époque (plongée, contre plongée...) Très tôt, la lecture, l'écriture de la poésie furent l'essence même de sa vie. Traversée par un souffle mystique, sa poésie, sobre et essentielle, est imprégnée par son amour de la nature. Silex, son premier recueil, exalte cette nature qu'il côtoyait de près. Son ami Armand Simon illustrera ce recueil. En 1947, il adhère au groupe «Haute Nuit» qui rassemble les artistes surréalistes de Mons et des environs. Sous la présidence de Maurice Arnould, on y rencontre notamment le photographe Marcel Lefrancq, le dessinateur Armand Simon, le peintre Louis Van de Spiegele, ainsi que le poète Achille Chavée... Si la fréquentation des surréalistes enrichit et stimule Franz Moreau, il se garde bien d'en imiter les excès et les procédés d'écriture. Simplement, le surréalisme conforte ses idées sur l'amour, la liberté, le non conformisme. En 1948, emportés par leur idéal communiste, Franz Moreau et Pol Bury (créateur d'art mobile) s'engagent comme volontaires, dans un camp de travail en Bulgarie. Franz en revient très déçu par ce qu'il y a découvert d'un point de vue social et politique. De plus, le soleil ardent, une nourriture insuffisante, le dur travail manuel auquel il n'est pas habitué ont eu raison de sa santé. Atteint par la tuberculose, il sera obligé de séjourner durant un an à Briançon, dans les Hautes Alpes, pour y être soigné. Sa femme l'accompagne et lui consacre tout son temps pour l'aider à surmonter la maladie. Il gardera de ce séjour un intérêt majeur pour la montagne et y retournera plusieurs fois. En 1950, plusieurs membres du groupe «Haute Nuit» dont Franz Moreau forment, avec les céramistes de la Maîtrise de Nimy, Louis Waëm, Georges Destrebecq et Fernande Massart, un groupe littéraire et artistique baptisé «Le Tour» . Un recueil collectif éponyme paraît en 1951. Ce recueil présente des dessins, des photos, des poèmes. Parmi ceux-ci, apparaissent les signatures posthumes de Robert Desnos et Fernand Dumont, ainsi qu'une importante contribution de Franz Moreau. La rencontre avec Madeleine Biefnot en 1954 bouleversera sa vie. Pour celle avec laquelle il aura trois enfants, François, Marie-Blanche et Olivier, il écrira des poèmes d'amour réunis dans «naturelle» et «Trempée». En 1955, il publie Ithaque, recueil de poèmes d'un désarroi profond écrits après le décès de sa mère qu'il vénérait et à laquelle il dédie cette oeuvre. Déchiré entre l'amour qu'il porte à ses enfants légitimes et celui qu'il porte à ses enfants naturels, épuisé par des soucis financiers ingérables, il est atteint de graves dépressions. Après une tentative de suicide, il est soigné dans une institution de la région du Centre, à Manage. En 1962, âgé de 49 ans, Franz Moreau meurt d'un infarctus. Une cérémonie religieuse célébrée dans un temple protestant de Mons verra la foule nombreuse de ses élèves venus lui rendre un dernier hommage. Le poète est inhumé au cimetière d' Anderlues, près de Binche. Son recueil Silences pour l'âme sera édité à titre posthume grâce au poète Fernand Verhesen. Le manuscrit Courbure du Temps qu'il confia à sa fille Danielle en 1958, sera édité en 2002. Cet ouvrage reprend l'ensemble de l'oeuvre poétique qu'il avait remaniée.